Service et sacrifice
- 20 oct. 2024
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La demande de Jacques et Jean est tout à fait humaine. A leur place, nous aurions nous aussi cherché des places privilégiées. Et si les autres disciples se sont indignés, c’est parce qu’eux aussi souhaitaient avoir ces places d’honneur . On peut dire que ce dimanche-ci, il est question d’honneur et de pouvoir. Dimanche dernier, il était question de richesse et Jésus invitait à savoir se détacher des richesses matérielles pour se faire un trésor dans le ciel. Dans l’évangile de ce jour, le Seigneur nous invite à sacrifier notre volonté de pouvoir, notre recherche de titres et de sécurités humaines sur l’autel de son abaissement. En effet, l’homme qui plaît au Seigneur, c’est celui qui revêt la tunique du serviteur. Servir et non être servi, voici l’orientation que le Christ donne à chacun. Le Christ ne cherche pas à constituer avec ses disciples un corps d’élites mais il veut faire de tous une fraternité de serviteurs. Manifestement, Jacques et Jean ne savaient pas ce qu’ils demandaient. Pour eux, c’étaient les premières places mais en fait, il s’agissait des toutes dernières puisque c’est là que le Christ est venu s’installer.

Comme dans l’épisode du dimanche dernier avec le jeune homme riche, il y a un appel au sacrifice : sacrifier son bien-être matériel ; sacrifier son ego, ses prérogatives. Le sacrifice que Dieu nous demande doit nous en coûter. Il doit être éprouvant. Si nous donnons aux autres, si nous nous donnons pour eux sans aucune difficulté, nous n’avons pas encore atteint le niveau du sacrifice. La pauvre veuve qui donne les deux piécettes qu’elle a pour vivre accomplit un sacrifice plus grand que les riches qui donnent de leur superflu. Faire des dons pour des actions caritatives, c’est une excellente chose. Mais aller au contact des pauvres, leur porter de la nourriture, les aider à s’installer chez eux, faire leur ménage, bref être à leur service, voici un sacrifice encore plus grand. Parce que dans cette attitude, on ne parle pas de condescendance vis-à-vis de l’autre, c’est-à-dire de prise de haut, mais d’un réel abaissement, autrement dit du partage de la condition de l’autre.
Le sacrifice a un pouvoir salvateur, libérateur, un pouvoir bienfaisant pour les autres. Les sacrifices que consentent les parents sont en faveur du bonheur de leurs enfants. Le sacrifice qu’a consenti le Christ sur la croix a été pour le salut de l’humanité entière. Nous pouvons le confesser : c’est le plus grand sacrifice puisqu’il a visé, non pas quelques proches, mais la multitude. En s’abaissant et en donnant librement sa vie pour nous, le Christ nous a sauvés, il nous a libérés et nous a justifiés. C’est pourquoi la croix représente davantage à nos yeux l’expression parfaite du don, de l’amour infini et miséricordieux du Seigneur et beaucoup moins le supplice et la souffrance. En clair, un sacrifice a une efficacité, une utilité, une fécondité. Ce qui rend fructueux un sacrifice, sur le plan spirituel, c’est l’offrande. Un service qui est accompli par simple philanthropie, ou a contrario sous la contrainte ou pour éviter d’indigner les autres n’est pas un sacrifice. Le sacrifice appelle un don libre et joyeux. Beaucoup de situations éprouvantes sont spirituellement stériles parce que nous les vivons dans la plainte, la révolte, le déni.
Au bout du sacrifice, il doit toujours avoir la foi. C’est la foi qui nous conduit à nous abaisser ; c’est dans la foi que nous offrons nos épreuves au Seigneur pour le salut des autres. Les trois enfants de Fatima ont connu d’énormes souffrances avant de mourir très jeunes pour deux d’entre eux, mais ils offraient ces souffrances pour le pardon des péchés. Voici une prière d’offrande qui peut accompagner un sacrifice : Seigneur je sacrifie mon ego, je m’abaisse et me mets au service des plus pauvres pour que tu les relèves. Je t’offre mes douleurs et souffrances physiques pour que tu soulages celles de ceux qui n’en peuvent plus et qui vivent leurs épreuves dans un esprit de révolte. De la sorte, nous pourrons faire de chaque service, de chaque sacrifice, une prière en faveur de nous-mêmes et du monde entier.
Père Koidou-Ledoux
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